Lettre ouverte à Monsieur Dominique Bussereau, ministre de l’Agriculture et

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Lettre ouverte à Monsieur Dominique Bussereau, ministre de l'Agriculture et

Monsieur le Ministre,

Le Conseil de l’Europe réunira les 19 et 20 décembre 2006 prochains les
ministres en charge des questions agricoles, afin de discuter puis
éventuellement valider les principes du projet finlandais de révision de la
réglementation européenne relative à l’agriculture biologique.

La fédération FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT s’engage au quotidien pour une
agriculture durable et respectueuse de l’environnement. L’agriculture dite
biologique participe concrètement de cet objectif et nous souhaitons
vivement que le règlement actuellement en discussion ne remette pas en cause
ses fondements et son intégrité.

D’une part, nous nous inquiétons, de la précipitation avec laquelle le
règlement est actuellement discuté. Les modifications incessantes du texte
ne permettent pas en effet une discussion et un échange sereins de
positions. Il ne peut en ressortir qu’un texte faible, fruit de compromis
mal articulés.

D’autre part, nous sommes scandalisés par l’article 7 aa (2) de ce
règlement, qui entérine la possibilité d’avoir 0,9 % d’OGM dans un produit
labellisé « bio », par un renvoi à la directive 2001/18 relative à la
dissémination volontaire d’OGM. Pire, le texte actuellement en discussion ne
permet pas aux Etats-membres de prévoir des seuils plus contraignants et
respectueux de la diversité des modes d’exploitations agricoles.

L’agriculture biologique est cependant un indicateur essentiel de
biodiversité, notamment par rapport à la dispersion d’OGM dans
l’environnement. Accepter un seuil de 0,9 %, c’est reconnaître tout d’abord que la
coexistence entre les cultures traditionnelles et les OGM est impossible.
C’est aussi refuser d’en tirer les conséquences et accepter la course en avant
actuelle vers un monde du vivant envahi par les OGM, où les végétaux, avec
leurs gènes résistants aux insectes et aux maladies, engendreront des
insectes et maladies toujours plus virulents et nécessitant des produits
phytosanitaires toujours plus agressifs pour l’environnement. C’est
également accepter la fuite en avant de l’industrialisation de
l’agriculture, en opposition radicale avec la logique d’une agriculture durable qui devrait
être l’objectif d’une politique responsable vis à vis des générations
futures : une agriculture plus autonome - particulièrement en réduisant sa
dépendance à la pétrochimie - et économe en moyens. C’est enfin jouer le jeu
des grandes firmes agro-semencières, conditionné par le profit au mépris des
équilibres naturels, mais aussi de la santé humaine.

Les discussions actuelles et le positionnement qui sera adopté lors du
prochain Conseil des ministres constituent ainsi un moment charnière dans
l’histoire du vivant. Souhaitons-nous vraiment porter un coup qui pourrait être fatal à
l’agriculture biologique, une des garante de la biodiversité aujourd’hui ?

Nous nous y refusons et vous demandons donc de vous opposer à ce projet de
règlement, en ce qu’il ne constitue pas un texte protecteur de l’agriculture
biologique mais, bien au contraire, programme sa disparition de fait, en
terme d’alternative et de référence crédibles.

En espérant que notre demande recevra un accueil favorable, nous vous prions
de bien vouloir agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de notre
considération distinguée.

Sébastien Genest, Président de France Nature Environnement

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