Projet de loi sur la responsabilité environnementale : après le projet de loi OGM. Bis repetita ?

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Projet de loi sur la responsabilité environnementale : après le projet de loi OGM. Bis repetita ?

Le Gouvernement élabore actuellement le projet de loi qui devra permettre de transposer en droit français les exigences de la directive communautaire 2004/35 sur la responsabilité environnementale. Ce texte, très important, devrait induire des conséquences concrètes pour le droit et l’environnement : définition du dommage environnemental, du responsable, des mesures de prévention et de réparation...

Il devrait normalement être présenté en Conseil des ministres au mois de décembre et au Parlement début 2007. Malheureusement, sous la pression de certains groupes d’intérêts, le contenu du projet de loi s’est éloigné de la directive et comporte désormais un risque considérable de recul du droit de l’environnement…un comble !

Isolé, le Ministère de l’Ecologie ne pèse pas assez lourd dans la négociation. C’est la raison pour laquelle la fédération France Nature Environnement a adressé une lettre ouverte au Premier ministre pour lui demander d’arbitrer en faveur de l’environnement et du respect par la France de ses engagements européens.

France Nature Environnement espère ainsi éviter que ne se reproduise ce qui vient de se passer pour le projet de loi OGM : un projet de loi mal rédigé, incompatible avec la directive OGM qu’il devait transposer, finalement retiré des débats parlementaires. La France risque maintenant une condamnation financière par la Cour de justice européenne.

Bis repetita ?


Objet : Lettre ouverte : élaboration du projet de loi de transposition de la directive communautaire 2004-35 sur la responsabilité environnementale

Monsieur le Premier Ministre,

Agissant en qualité de Président de France Nature Environnement, fédération française des associations de protection de la nature et de l’environnement, j’ai l’honneur de venir vers vous dans le cadre du dossier visé en référence.

France Nature Environnement a été consultée, par le Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable, lors de l’élaboration de l’avant projet de loi de transposition de la directive 2004/35 sur la responsabilité environnementale. La Fédération est particulièrement attentive à l’évolution de ce texte, dont les conséquences pour le droit et l’environnement seront importantes et nombreuses.

Ce texte doit maintenant vous être soumis pour arbitrage et c’est à cette occasion que France Nature Environnement souhaite rappeler les cinq points fondamentaux qui, selon elle, devraient être inscrits dans le projet de loi.

1° L’octroi d’une autorisation administrative ne doit pas constituer une cause d’exonération de responsabilité pour son bénéficiaire. La directive n’impose pas une telle option qui n’est pas transposée dans les autres Etats membres.

2° France Nature Environnement souhaite la transposition littérale dans le projet de loi de la définition de l’exploitant responsable contenue dans la directive de manière à responsabiliser, notamment, les actionnaires principaux des exploitants.

3° Il importe de prévoir dans ce projet de loi l’obligation pour l’exploitant de constituer des garanties financières en début d’activité de manière à assurer le financement des mesures de prévention et de réparation des atteintes éventuelles à l’environnement.

4° La théorie du risque développement ne doit pas constituer une nouvelle cause d’exonération de responsabilité pour l’exploitant. Rappelons en outre que cette théorie suppose une inversion de la charge de la preuve, qui a toujours été combattue par les industriels.

5° L’obligation de police relative à la remise en état des sites doit demeurer imprescriptible. En tout état de cause, il n’est pas acceptable que le point de départ d’un éventuel délai de prescription puisse être fixé à la date de réalisation du fait générateur du dommage. Cela aurait pour principale conséquence de mettre à la charge des finances publiques la remise en état de très nombreux sites dont le caractère pollué n’est bien souvent connu que longtemps après les faits, en raison du silence de l’exploitant à l’origine des désordres.

France Nature Environnement est particulièrement inquiète de ce que ces cinq points soient absents de la version au 20 septembre 2006 de l’avant projet de loi. Dans sa rédaction actuelle, ce texte comporte plusieurs risques de régression du droit de l’environnement, d’accroissement de charges pour les finances publiques, et de contentieux.

Il apparaît donc nécessaire que l’avant projet de loi soit modifié de manière à être compatible avec la directive qu’il est censé transposer. Une transposition complète et rigoureuse des directives communautaires pourra, certes, contrarier certains groupes de pression, mais évitera de nouveaux contentieux et préviendra de nouvelles condamnations financières de la France par la Cour de justice des communautés européennes.

Enfin, il est regrettable que la lecture de ce texte soit rendue si difficile par le recours à de nombreux renvois ou à des notions imprécises.

Je reste bien entendu à votre entière disposition pour conférer avec vous de la présente et pour vous rencontrer.

Je vous prie de bien vouloir agréer, Monsieur le Premier Ministre, l’expression de ma très haute considération.

Sébastien Genest, Président de France Nature Environnement

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