Les députés européens votent pour moins de déchets et remettent l’incinération à sa place

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Les députés européens votent pour moins de déchets et remettent l'incinération à sa place

Le CNIID et les Amis de la Terre saluent le vote ce matin des députés membres de la commission Environnement du Parlement européen, qui fixe des objectifs à atteindre en matière de prévention des déchets. Les associations se réjouissent que les députés aient également rejeté la proposition controversée de la Commission européenne visant à promouvoir l’incinération, mais regrettent que des mesures supplémentaires visant à promouvoir le recyclage n’aient pas été adoptées.

La commission Environnement du Parlement européen s’est prononcée ce matin sur la révision de la Directive Cadre sur les déchets, qui fixe les grandes orientations de la politique de gestion des déchets en Europe et qui fera l’objet d’une discussion entre les gouvernements le 18 décembre et d’un vote en séance plénière au Parlement mi-février 2007. Une majorité de députés a accepté d’intégrer des mesures sur la prévention des déchets (stabilisation de la production de déchets d’ici 2012) et a repoussé les propositions de la Commission européenne visant à reclassifier les incinérateurs comme « opérations de valorisation énergétique des déchets » au motif que ceux-ci produisent de l’énergie.

« La majorité des députés a reconnu que la fonction principale d’un incinérateur est d’éliminer les déchets, pas de les valoriser », s’est réjoui Sébastien Lapeyre, chargé de mission Incinération au CNIID. « Nous demandons donc à tous les députés de suivre ces recommandations lors du prochain vote en séance plénière, et nous demandons au gouvernement français d’arrêter de promouvoir l’incinération. »

Parmi les 9 députés français siégeant à la commission Environnement du Parlement, la députée Françoise Grossetête (UMP) avait activement soutenu cette reclassification de l’incinération en allant même jusqu’à proposer dans un amendement des conditions moins strictes pour la rendre possible. « A l’heure où tous les partis politiques français affirment se soucier d’environnement, il est déplorable de voir certains de nos députés promouvoir à Bruxelles des mesures qui aggraveraient le gaspillage de nos ressources naturelles et augmenteraient encore la quantité de déchets incinérés, déplore Eric Gall, Directeur du CNIID. En vue du prochain vote sur la Directive Déchets, nous allons tout faire pour nous assurer que les votes de nos élus à Bruxelles soient conformes aux déclarations de leurs partis sur la nécessité de préserver l’environnement. »
« Les députés ont bien fait de demander une stabilisation de notre production de déchets d’ici 2012, mais nous sommes déçus qu’ils n’aient pas adopté des objectifs ambitieux pour le recyclage », a déclaré Anne Bringault, Directrice des Amis de la Terre. « Des études récentes confirment que non seulement le recyclage économise des ressources précieuses comme les métaux, les forêts ou le pétrole, mais qu’il permet également de réduire nos émissions de gaz à effet de serre en nous faisant économiser de l’énergie. Nous continuerons donc à pousser les députés à introduire des mesures pour favoriser le recyclage. »
Une étude britannique récente conclue que « le recyclage en Grande-Bretagne permet d’économiser entre 10 et 15 millions de tonnes d’équivalent carbone de gaz à effet de serre par an comparé à d’autres options de gestion des déchets [1] ». En vue du vote du Parlement européen en première lecture sur la révision de la Directive Déchets, prévu mi-février 2007, les associations demandent que des objectifs clairs soient adoptés : un taux de recyclage des déchets de 70% d’ici 2020 ainsi qu’une élimination progressive d’ici 2025 de la mise en décharge et de l’incinération de tous les déchets qui sont ré-utilisables, recyclables et compostables [2].
Au niveau de la Communauté européenne, une reclassification de l’incinération de déchets serait la porte ouverte, au sens propre comme au figuré, à un marché transfrontalier de millions de tonnes de déchets bruts destinées à être incinérés, en alimentant notamment les pays où les coûts seront les plus faibles. La Commission européenne a d’ailleurs été condamnée par la Cour de Justice européenne (CJCE) en 2002 suite au soutien d’un transfert de déchets ménagers du Luxembourg vers l’incinérateur de Strasbourg prétextant qu’il entrait dans un processus de valorisation. La CJCE avait alors contredit la Commission et confirmé que le but premier de l’incinération est d’éliminer les déchets, pas de les valoriser.

La fonction première demandée à une UIOM (Usine d’Incinération d’Ordures Ménagères) est de minéraliser par combustion les déchets de nos poubelles, et pas de produire une énergie quelconque (chaleur ou électricité) qui n’est qu’une utilisation secondaire. Et le discours sur les bienfaits de l’incinération sur notre climat ne résiste pas à l’analyse : un des meilleurs combustibles présents dans nos poubelles sont les plastiques, produits à partir d’énergie fossile. Un récent rapport des Amis de la Terre du Royaume-Uni montre que les incinérateurs producteurs d’électricité génèrent 33% de plus de CO2 par kWh qu’une centrale électrique au gaz naturel[3].

Source : Rapport consultable en français

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