« Firefox est un bon citoyen d’Internet »

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« Firefox est un bon citoyen d'Internet »

Mike Shaver, un des responsables du développement du célèbre navigateur, explique sa philosophie :

Au lancement de Mozilla Firefox, fin 2004, le marché des navigateurs web est en situation de quasi-monopole. Plus de 90 % des utilisateurs utilisent Internet Explorer, de Microsoft. En moins de trois ans, le logiciel de Mozilla, développé par des volontaires répartis sur la planète, est devenu un acteur majeur . En Europe, il est utilisé par 24,1 % des internautes. Quelque 45 % des visiteurs du site ecrans.fr l’ont adopté. Mike Shaver, un des responsables du développement de Firefox chez Mozilla, était de passage à Paris le mois dernier.

Quel est votre rôle au sein de Mozilla ?

Je suis responsable de notre « écosystème ». C’est-à-dire que je m’occupe des interactions avec toutes les personnes qui utilisent la technologie Mozilla. Mais ma première préoccupation concerne l’acceptation par tous des standards ouverts du web. Ce sont les règles qui permettent d’assurer le bon fonctionnement des sites quel que soit le navigateur web utilisé. On pourrait croire que cela va de soi, mais des entreprises comme Microsoft tentent d’imposer leur vision propriétaire du net. Dans l’idée, je représente donc plus le web en général que Firefox.

En quelques années, Firefox a contribué à faire évoluer le web. Comment voyez-vous la suite ?

On a créé Firefox parce qu’on devait le faire. A l’époque, il y avait un monopole d’Internet Explorer, qui n’évoluait plus. Ce qui a tué toute innovation pendant des années. Notre but, ce n’est pas d’avoir un monopole, mais de créer un navigateur qui se comporte correctement et qui rende le web plus sain. Aujourd’hui, nous avons une influence sur son évolution et c’est une grande responsabilité. Mais on serait ravis de ne pas avoir à le faire ! On voit avant tout Firefox comme un bon citoyen d’Internet. Le fait qu’il soit devenu une marque reconnue permet d’assurer la diversité. C’est indispensable pour l’innovation.
Une grosse partie des revenus de Mozilla provient d’une entreprise privée, Google.
Nous partageons certaines valeurs avec Google et nous travaillons ensemble sur de nombreuses innovations. Ils dépendent énormément de la bonne santé du web. Quelques-uns de nos contributeurs sont d’ailleurs salariés à Mountain View. Depuis 2004, Google paie effectivement Mozilla pour être présent dans Firefox. Nous avons besoin de cet argent pour nous assurer que Mozilla est là pour longtemps. Et ce trésor de guerre nous permet d’avoir une réserve de ce que nous appelons du « fuck you money ». Nous avons les moyens d’envoyer paître n’importe qui si une proposition est contraire à notre éthique. Même si la somme en jeu est importante. Nos objectifs sont de rendre nos utilisateurs heureux, de gagner des parts de marché et, éventuellement, de gagner de l’argent.

Comment expliquez-vous le succès de Firefox ?

Contrairement à beaucoup de projets logiciels, nos utilisateurs sont notre première préoccupation. Ce serait plus facile de se contenter de faire notre logiciel entre nous, avec nos préoccupations et notre vision. Mais notre but premier est d’influer sur la marche du web. Nous devons donc, avant tout, nous soucier des demandes et des besoins des internautes. Il faut toujours nous remettre en question. Et c’est souvent difficile et fatiguant. Ce serait plus simple de ne pas avoir de doutes.
Mozilla est une organisation très ouverte, avec de très nombreux intervenants. Comment se prennent les décisions ?
Nous avons une hiérarchie et des responsables qui prennent les décisions. Ils sont à ces postes parce qu’ils ont prouvé leur qualité. Mozilla n’est pas une démocratie, c’est une méritocratie. Notre directeur technique, par exemple, est Brendan Eich, le créateur du javascript, l’un des langages informatiques les plus utilisés sur le web. Nous prenons des décisions audacieuses, et nous faisons parfois des erreurs. Au final, nous prenons ces décisions parce que nous pensons qu’elles sont meilleures pour le web. Et nous avons une pression supplémentaire : le produit que nous éditons ne nous appartient pas. Si la communauté des développeurs se trouve un jour en désaccord avec nos choix, elle peut décider de se passer de nous et créer une autre structure.
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