Comme le bonheur, le commerce équitable est dans le pré. Si la marque leader du secteur est installée à Fleurance dans le Gers, c’est au précédent employeur de Rémi Roux, un des trois cofondateurs d’Ethiquable, qu’elle le doit et peut-être aussi à son arrière-grand-mère gersoise.

Avant de démarrer cette entreprise sociale, Rémi Roux a commencé par travailler dans la communication d’une maison de disques, puis comme chef de produit et commercial dans l’agroalimentaire, ce qui a amené ce Toulonnais d’origine à Fleurance.

En 2002, la quarantaine approchant, il convainc deux copains de longue date de se lancer dans la création d’entreprise. Il a connu Stéphane Comar à l’École supérieure de gestion, puis Christophe Eberhart, ingénieur agronome en Afrique. Trois profils complémentaires qui vont donner le succès de l’entreprise.

créer un lien entre les entreprises locales et les agriculteurs du Sud

« Vu nos parcours, explique aujourd’hui Rémi Roux, on voulait créer une entreprise qui a du sens, avec des gains financiers remis au service de la collectivité : les salariés d’Ethiquable, les autres entreprises de Fleurance et nos partenaires agricoles des pays du Sud, tout en contribuant à donner une autre vision du monde aux consommateurs. »

Dès l’année suivante, la scop est lancée pour assurer des débouchés dans la grande distribution aux agriculteurs, d’abord des producteurs de café du Pérou et de l’Équateur, à qui ils sont toujours fidèles, puis des dizaines d’autres. Pour leur assurer des revenus décents, Rémi Roux, en fin négociateur, impose des marges réduites aux supermarchés.

« L’entreprise sociale doit être ambitieuse, poursuit-il. Nous avons atteint notre taille critique de 15 millions d’euros de chiffre d’affaires, avec une soixantaine de salariés. Cela nous permet désormais de proposer de nouveaux produits dans les rayons, de créer des antennes d’Ethiquable au Benelux et d’imaginer une nouvelle marque Paysans d’ici pour les agriculteurs en France. » Un juste retour des choses pour une société implantée dans un département agricole.

s’installer dans la durée

La coopérative était la forme la plus adaptée à leur projet économique et social. La vie collective, Rémi Roux connaît. Il est issu d’une famille nombreuse, avec un père médecin et une mère militante de l’Action générale catholique féminine. Aujourd’hui, la rémunération des fondateurs n’est que trois fois plus élevée que le plus petit salaire de l’entreprise.

« On cherchait une forme d’entreprise dans laquelle on soit à l’aise, confirme Stéphane Comar, compagnon de l’aventure. Le rapport à l’argent et au pouvoir n’est pas le même que dans une entreprise conventionnelle. Depuis le début, on est tous les trois d’accord pour ne pas chercher à faire un gain financier, mais on veillera à ce qu’Ethiquable ait les capacités de durer. »

Il souligne aussi que passer les caps difficiles de la vie d’une entreprise, c’est plus facile lorsque l’on est trois.

garder les pieds sur terre

Souvent enclin à titiller avec bonhomie l’univers un peu compassé de l’économie sociale, Rémi Roux craint-il de devenir lui aussi une institution ? Il est devenu récemment vice-président du Mouves, président du réseau Entreprendre local, mais aussi des patrons qui l’avaient accompagné dans la création d’Ethiquable et président de l’Union régionale des scop Midi-Pyrénées.

Il dit vouloir garder les pieds sur terre. Il en veut pour preuve l’ouverture l’an dernier, avec des salariés d’Ethiquable, d’un jardin de Cocagne pour les personnes en insertion de Fleurance.