Quand notre bonheur au travail conditionne notre bonheur global

La part du bonheur professionnel conditionne énormément notre bonheur en général ©Getty - 10'000 Hours
La part du bonheur professionnel conditionne énormément notre bonheur en général ©Getty - 10'000 Hours
La part du bonheur professionnel conditionne énormément notre bonheur en général ©Getty - 10'000 Hours
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Thibaut explique comment l’articulation entre la vie privée et la vie professionnelle pèse ensemble sur notre bonheur global. Autant que la santé et la maladie, physiques et mentales, le succès ou l’échec dépendent aussi de l’organisation sociale et donc du travail.

Est-ce que vous savez ce que c'est un "happiness manager" ? En bon français, c’est le responsable du bonheur dans une entreprise. Ça a eu le vent en poupe à la fin des années 2000, à peu près quand on a commencé à se rendre compte que ce n’était pas totalement absurde de se préoccuper du bonheur des salariés pour des raisons, je vous rassure, qui n’ont absolument rien d’altruistes : on est simplement plus efficace si on n’est pas totalement au bout de sa vie au bureau. Bon, après tout, pourquoi pas ? Avant de critiquer, voyons ce que ça peut donner le bonheur au travail.

Quel rapport entre le bonheur et le travail ?

Oui, est-ce qu’on ne serait pas en train de confondre le bien-être et le bonheur ?

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Parce que si le bien-être au travail est une question politique et sociale, le bonheur lui semble relever de la sphère individuelle. Et pourtant, si le bonheur était un sujet vraiment politique et si, en en faisant une question privée, on ratait notre cible ?

C’est ce que montre très bien le livre d’Eva Illouz et Edgar Cabanas "Happycratie" paru en 2018. Leur thèse c’est que cantonner le bonheur à la sphère privée et psychologique, c’est masquer de vrais enjeux de société. Car penser que pour être heureux il suffit de savoir contrôler nos sentiments négatifs, nos désirs et pensées toxiques, bref, penser que chacun et chacune peut construire, apprendre voire acheter son bonheur, c’est s’empêcher de voir ce qui, dans l’organisation sociale joue sur la possibilité même de notre bonheur, et notamment au travail que nous répétons quotidiennement.

Dans les deux Alfred, on voit bien comment l’articulation entre la vie privée et la vie professionnelle, c’est-à-dire la question fondamentale du temps, pèse sur les personnages. Oui parce que, petit détail, dans cette entreprise apparemment idéale, la philosophie c’est « no kids » : donc tous les personnages jonglent pour s’occuper de leurs enfants tout en restant disponibles H24.

Et on peut penser par exemple à la question du congé paternité – particulièrement courts en France : équilibrer la charge parentale au sein d’un couple, ce n’est pas juste savoir gérer on mec ! Ça dépend aussi du temps dont notre conjoint pourra disposer pour être présent dès la naissance. Ça peut être aussi la question plus globale du temps de travail de manière : comment est-ce que je peux m’engager dans une association par exemple si je suis soumise à des horaires harassants ? Comment prendre soin de soi, des autres, de la famille, des personnes âgés puisque c’est d’actualité si nous n’avons aucun temps ni aucune énergie pour cela ? Et cette question-là, elle est bien politique et on ne peut pas s’en saisir si nous cantonnons le bonheur à la sphère privée.

Alors oui, mille fois oui, pensons à comment faire face aux souffrances de la vie, mais, n’oublions pas pour autant que la santé et la maladie, physiques et mentales, la fatigue, le succès ou l’échec, dépendent aussi de l’organisation sociale, du travail notamment, et déterminent les efforts que notre volonté est capable de produire et de soutenir. Construisons donc ensemble le cadre et le lien commun dans lesquels chacun et chacune, pourront être heureux, "E.R.E". comme dirait Roger Rabbit.

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