Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

Amar Henni : « Il faut faire revenir les éducateurs de rue dans les quartiers »

Faute d’adultes référents, les jeunes des cités n’ont plus affaire qu’à des caïds et à des policiers, estime l’anthropologue et éducateur. Les travailleurs sociaux doivent d’urgence intervenir hors de l’école pour les sortir de l’intégrisme ou de la délinquance.

Publié le 21 octobre 2016 à 12h25, modifié le 22 octobre 2016 à 12h21 Temps de Lecture 4 min.

Article réservé aux abonnés

Deux véhicules de police, avec quatre agents à bord, ont été attaqués avec des cocktails Molotov, le samedi 8 octobre, à Viry-Châtillon (Essonne).

Par Amar Henni (Educateur et anthropologue)

Dans un contexte marqué par les attentats, les récents affrontements entre jeunes et policiers dans les banlieues françaises, l’agression de quatre fonctionnaires à Viry-Châtillon (Essonne) ont ranimé l’éternel débat sur les mythes des « zones de non-droit ». Cependant, parler de « ghettoïsation » n’est pas approprié. La question centrale est celle de l’éducation, et nous devons réinvestir cette question éducative, pas seulement dans le cadre scolaire, mais aussi en dehors de l’école avec des professionnels.

Il existe chez certains jeunes ce que j’appelle une « banalisation de la mort », apparue dans le milieu des années 1980. La désindustrialisation et l’intrusion de l’héroïne dans les quartiers ont fait des ravages. Ce sont des milliers de décès qui ont été passés sous silence ; ils n’ont pas compté comme des enfants d’ouvriers mais comme des « toxicos » ou des voyous.

Dès lors que la drogue avait envahi les quartiers populaires, des « vocations » de trafiquants se sont multipliées. Et avec elles, des mécanismes propres à la délinquance se sont imposés. Des jeunes pouvaient avoir grandi dans le même quartier, avoir les mêmes origines sociales et s’entretuer pour défendre leur « réputation ». Ainsi, le meurtre s’est banalisé. La mort ne relevait plus du sacré. La liste de jeunes tués par des forces de l’ordre, par des gardiens d’immeuble, par des agents de sécurité ou par d’autres jeunes pour un regard, une futilité venaient conforter un « imaginaire » où tuer ou se faire tuer devenait banal. Nous sommes même passés d’une « banalisation de la mort » à « une banalisation du crime ».

En l’absence de pratique éducative hors de l’école, la religion a pris le relais pour contenir les dérives des adolescents

Paradoxalement, beaucoup de professionnels ne voulaient pas prendre la mesure des dangers que présentaient ces lois du quartier par lesquelles nombre d’adolescents étaient trop souvent attirés. En effet, ils considéraient que ces « jeunes » ne relevaient plus de leur responsabilité parce qu’ils étaient hors-la-loi, abandonnant toute approche éducative auprès de ces enfants. Nous étions encore quelques-uns à dénoncer le fait que, plus largement, l’Etat ne voulait plus assumer sa mission éducative auprès des enfants et des adolescents durant leur temps libre. En l’absence de pratique éducative, la religion prenait le relais pour contenir les dérives des adolescents ralliés aux codes du quartier.

Il vous reste 57.03% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.