234 rescapé.e.s livré.e.s à l’incertitude : les États membres de l’Union européenne doivent leur désigner un lieu sûr pour débarquer conformément au droit maritime

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234 rescapé.e.s livré.e.s à l'incertitude : les États membres de l'Union européenne doivent leur désigner un lieu sûr pour débarquer conformément au droit maritime

Entre le 22 et le 26 octobre 2022, l’Ocean Viking a secouru 234 femmes, enfants et hommes, dont plus de 40 personnes mineures non accompagnées. Ces personnes ont été trouvées en grave danger de naufrage imminent sur six embarcations impropres à la navigation, dangereusement surchargées. Depuis le lancement de ses opérations de recherche et de sauvetage (SAR) en 2016, SOS MEDITERRANEE sollicite systématiquement la coordination des centres de coordination des secours maritimes (MRCC) compétents, (...)

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01-11-2022 par Guillaume Chocteau (ESS et Société)

Les 234 rescapés secourus par l’Ocean Viking sont dans l’attente de pouvoir débarquer dans un port sûr depuis onze jours. Toutes ces personnes sont dans l’incertitude la plus totale, bloquées sur le pont de l’Ocean Viking. SOS MEDITERRANEE et la FICR appellent au respect du droit maritime et demandent qu’une solution immédiate soit trouvée pour leur débarquement.

L’Ocean Viking - un navire de recherche et de sauvetage affrété par SOS MEDITERRANEE en partenariat avec la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) - a secouru 234 femmes, enfants et hommes de six embarcations en détresse en Méditerranée centrale entre le 22 et le 26 octobre 2022.

« Les personnes secourues en Méditerranée centrale par des navires humanitaires devraient et doivent être autorisées à débarquer dans un lieu sûr dans un délai raisonnable, comme c’est le cas pour les opérations de recherche et de sauvetage menées par les autorités et les navires marchands. Les blocages toujours plus importants auxquels sont confrontés les navires de sauvetage dans cette partie de la mer depuis 2018 sont discriminatoires et inacceptables. Maintenir plus longtemps les rescapés à bord des navires, en otages du débat politique, serait le résultat d’un échec cuisant de la part des membres de l’Union européenne et des États associés »

déclare Sophie Beau, directrice générale de SOS MEDITERRANEE France.

« Les personnes secourues sont totalement épuisées, déshydratées, en détresse psychologique, et certaines ont besoin de soins médicaux immédiats. Nous leurs avons prodigué des soins de santé et les premiers soins psychologiques, servi de la nourriture et de l’eau, donné des articles d’hygiène ainsi que la possibilité d’appeler des membres de leur famille pour entrer en contact avec eux. Mais elles ne peuvent pas attendre plus longtemps, cette incertitude rend la situation insupportable avec un stress qui augmente de jour en jour. Elles ont besoin de toute urgence d’un port sûr »

déclare Frido Herinckx, responsable des opérations à la FICR.

Le droit des personnes à débarquer rapidement en lieu sûr ne peut pas être débattu. Le blocage actuel dans le processus de débarquement suite à des opérations de recherche et de sauvetage constitue une violation grave et conséquente du droit de la mer. La convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (SOLAS) définit de manière très détaillée les obligations des États et des capitaines de navires en matière de recherche et de sauvetage, de l’obligation de répondre et de coordonner la recherche des embarcations signalées en détresse jusqu’à l’obligation de désigner un « lieu sûr dès que cela est raisonnablement possible ». Toutes les circonstances sont prises en compte, y compris l’obligation pour les États les plus aptes à porter assistance, de coopérer afin d’identifier un lieu sûr pour le débarquement ; l’obligation de fournir une assistance « quels que soient la nationalité ou le statut de ces personnes » (Chapitre V - Règle 33.1- amendement 2004), ainsi que le fait que « l’évaluation du statut des personnes secourues « ne doit pas » retarder indûment le débarquement des survivants ». RÉSOLUTION MSC.167(78) de l’OMI (adoptée le 20 mai 2004).

Conformément aux conventions maritimes, l’Ocean Viking a informé les autorités maritimes compétentes à toutes les étapes des opérations de recherche et de sauvetage et a demandé la désignation d’un lieu sûr.

Nous devons donner la priorité aux opérations de recherche et de sauvetage des personnes en déplacement, quel que soit leur statut, et coopérer dans ce domaine, notamment en mettant en place des mécanismes de débarquement clairs, sûrs et prévisibles pour les personnes secourues.

SOS MEDITERRANEE et la FICR demandent instamment aux membres de l’UE et aux États associés de respecter le droit maritime, de coopérer à la désignation d’un lieu sûr pour les rescapés secourus par l’Ocean Viking et de mettre fin à la souffrance de centaines d’hommes, de femmes et d’enfants.

Extraits des conventions et résolutions maritimes internationales :
- Obligation pour l’État responsable de la zone SAR de trouver rapidement un lieu sûr pour le débarquement - Convention SAR chapitre 3 § 3.1.9 :

« La Partie responsable de la région de recherche et de sauvetage dans laquelle une assistance est prêtée assume au premier chef la responsabilité de veiller à ce que cette coordination et cette coopération soient assurées, afin que les survivants secourus soient débarqués du navire qui les a recueillis et conduits en lieu sûr, en prenant en compte les circonstances particulières du cas et des directives élaborées par l’Organisation. Dans ces cas, les Parties concernées prennent des dispositions pour que ce débarquement soit effectué dès que cela est raisonnablement possible. »

- Obligation de coopération et d’assistance de tous les États en vertu du principe de solidarité avec l’État SAR - Convention SAR chapitre 3 § 3.1.9 :

« Les Parties doivent coordonner et coopérer pour faire en sorte que les capitaines de navires qui fournissent une assistance en embarquant des personnes en détresse en mer soient libérés de leurs obligations avec un minimum de déviation supplémentaire par rapport au voyage prévu du navire, à condition que la libération du capitaine du navire de ces obligations ne compromette pas davantage la sauvegarde de la vie en mer »

- 

« L’obligation de prêter assistance s’applique quels que soient la nationalité ou le statut de ces personnes ou les circonstances dans lesquelles elles se trouvent. »

(Convention SOLAS Chapitre V, Règle 33.1, 1974 (telle que modifiée en 2006)

- 

« 6.20 Toutes les opérations et procédures telles que le filtrage et l’évaluation de l’état des personnes secourues qui vont au-delà de la fourniture d’une assistance aux personnes en détresse ne devraient pas être autorisées à entraver la fourniture de cette assistance ou à retarder indûment le débarquement des survivants du ou des navires qui prêtent assistance. »

RÉSOLUTION MSC.167(78) de l’OMI (adoptée le 20 mai 2004)

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