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Loi ESS 2014- Art.94 – La loi précise les contours du commerce équitable

9 octobre 2014, 21:30, par Eric Marchand

Bonjour,

Pour qui a suivi l’actualité du "commerce équitable" ces 20 dernières années, le contenu de votre article est pour le moins étonnant. L’avenir ne peut se nourrir que d’un présent et d’un passé assumés. Faute de quoi nous nous condamnons à répéter sans cesse les mêmes erreurs ; les mêmes causes conduisant inévitablement aux mêmes conséquences.

La loi de 2005 a été votée sur l’insistance des membres de la PFCE, faute d’obtenir par la négociation et la persuasion le label du commerce équitable exclusivement NORD-SUD qu’ils souhaitaient pouvoir créer et gérer au terme de négociations au sein de l’AFNOR, puis du copolco (organe de décision de l’ISO). L’échec des négociations étaient, entre autre, dà » à leur refus d’un commerce équitable Nord-Nord, voir d’un commerce équitable partout tel que le souhaitent d’autres organisations. Elle font d’ailleurs plus que le souhaiter. Elles le mettent en oeuvre concrètement, au jour le jour depuis de très nombreuses années.

Encore tout récemment, les membres de la PFCE et ceux du réseau IMPACT ne voulaient entendre parler que de commerce solidaire ou/et local pour le Nord.

Il n’est d’ailleurs toujours pas question de commerce équitable partout. C’est à dire avec des contraintes et obligations qui ne s’appliquent pas qu’aux seuls producteurs mais aussi aux autres acteurs des filières économiques, à commencer par la grande distribution (condition de travail et rémunération des caissières par exemple), de l’agro-industrie, de l’industrie semencière qui sont des lieux d’accumulation du pouvoir et des richesses.

Il est paradoxal de vouloir imposer une prime obligatoire en plus de prix rémunérateurs basé sur une étude des coà »ts de production : Si tel était le cas, pourquoi une prime en plus ? Des prix rémunérateurs, ce sont des prix qui permettent à tous les acteurs des filières de financer par eux-mêmes les projets collectifs qu’ils désirent. Une prime, c’est de l’aumône, de la bienfaisance. Soit. Ce n’est pas inutile. Mais lorsque ce n’est pas assumé, qui plus est maquillés derrière une revendication d’équité, c’est rendre les populations fragiles dépendantes d’une aide extérieure. De par l’asymétrie de la relation, c’est mettre le donateur (qu’il le veuille au non), en situation d’exercer un pouvoir d’ingérance sur la nature des projets collectifs à financer, comme si les "pauvres petits producteurs du nord comme du sud" n’étaient pas en mesure de décider par eux-mêmes. Ce pouvoir s’exerce ne serait-ce que par la volonté de contrôler que la prime a été bien utilisée.

C’est une des conséquences du développement des labels et certifications privées. Régis par la norme ISO 65, ces procédure sont de véritables boite noires qui contribuent directement à la privatisation des services publics de répression des fraudes au profit de multinationales de la certification, nouveaux lieux de concentration d’un pouvoir inou௠(le futur eldorado de la finance ?) : donner accès aux marchés les plus rémunérateurs de la planète. Il est donc contradictoire d’espérer un renforcement de la DIRRECTE (nouveau nom de la répression des fraudes) et de réclamer de nouvelles certifications et labels privés dont le principe de fonctionnement est le confit d’intérêt puisque : le contrôlé est aussi le client du contrôleur ; le contrôle est confidentiel , bien loin des exigence de base pour tout fonctionnement collectif et démocratique.

Il n’est pas besoin d’être devin pour prédire l’échec de ces nouvelles initiatives. Il suffit de se retourner sur les conséquences du développement du label AB, dont l’essentiel du développement à ce jour profite surtout à l’industrie aro-alimentaire, à la grande distribution qui, sans rien changer à leurs méthodes, s’approprient gratuitement le travail de milliers de producteurs et de militants honnêtes et sincères dans leurs engagements. Les perdants ? les petits producteurs qui ont (re)développé un véritable savoir-faire leur permettant de produire des aliments de première qualité sans nuire à l’environnement, puis de les échanger via des pratiques économiques riches en nouvelles libertés, droits, relation sociales denses et dignes.

Rendre compte des faits permettrait au débat et aux pratiques d’évoluer plus rapidement.

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