Société Coopérative d’Intérêt Collectif (Scic), Nouvelle donne territoriale - Nouvelle forme coopérative

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Société Coopérative d'Intérêt Collectif (Scic), Nouvelle donne territoriale - Nouvelle forme coopérative

Fin février 2004, 34 Scic ont été agréées par les préfectures départementales . Les partenaires de l’Inter-réseaux Scic estiment à 400 le nombre de projets susceptibles de se concrétiser à plus ou moins long terme.
Sont à ce jour investis par ces coopératives d’un nouveau style, des secteurs d’activité très divers, plus ou moins récents, mais qui préexistaient tous à la Scic .

Pourquoi donc fallait-il une nouvelle forme de coopérative ?
Parce que le vrai enjeu de la Scic ne réside ni dans une liste d’activités estampillées "d’intérêt collectif", ni dans un ciblage de publics qualifiés de "en difficulté sociale". L’utilité sociale et l’intérêt de la Scic se résument en un mot : autrement. Plus précisément "s’organiser autrement" pour mieux répondre aux besoins d’un territoire.
La décentralisation initiée depuis plusieurs décennies modifie lentement l’encadrement des rapports socio-économiques, certains centres de décision se décalent. L’intercommunalité, l’accroissement des compétences de la Région, la marche en avant de l’Union Européenne sur fond de mondialisation, créent de nouveaux repères, obligent à emprunter de nouveaux chemins. Et l’entreprise perd parfois de sa réactivité, et certains artisans ont du mal à survivre, et l’association 1901 ne reconnaît plus ses petits qui s’essoufflent….
La nouvelle donne territoriale appelle de nouvelles adaptations : la Scic en est une. Largement inspirée des "coopératives sociales italiennes", elle propose une organisation originale : puisque les différents partenaires socio-économiques n’ont plus les mêmes repères, et que les organisations publiques et collectives ont parfois du mal à se faire l’écho des divers besoins sociaux, rassemblons tous ces partenaires autour de la même table de décision ! Ils deviennent ainsi co-gestionnaires d’une structure économique d’où chacun doit tirer son parti, le territoire étant le parti pris de tous.
Ainsi des groupes privés, y compris des bénévoles, se saisissent en partie de l’intérêt général dans une structure économique commerciale, en collaboration avec les collectivités. Ainsi le producteur adapte en permanence son produit au souhait et à la solvabilité de l’utilisateur en compagnie duquel il décide. Ainsi le financeur prend la mesure de son risque à l’aune de l’expression de tous les partenaires réunis, et non du seul entrepreneur.

Facile à monter ? Oui et non ! Scic et précipitation ne vont pas de pair. Quelques Scic, sur les 34 agréées, paient aujourd’hui par une grande fragilité économique, le fait de n’avoir pas pris le temps de motiver, informer et former tous les types de sociétaires, ainsi que d’avoir surestimé leur capacité de production ou de commercialisation. En revanche, d’autres Scic sont fortes d’une expérience antérieure et transforment leur savoir-faire associatif ou de sarl en expérience collective de la prise de décision. L’efficacité de l’organisation dans plusieurs Scic agréées a généré des excédents dès la première année !

Un remède miracle ? Non, une démarche, une synergie d’acteurs à construire et à renouveler en permanence sur un territoire !
La Datar va prochainement initier avec la DGEFP et l’Avise (CDC et Inter-réseaux Scic), un programme d’appui à une vingtaine de projets de Scic en territoire rural, impliquant, dans ce cas, des collectivités publiques et des acteurs privés. Pourquoi cette opération, lancée après l’accord du CIADT du 3 septembre 2003 ? De l’avis même de certains élus, ainsi que de la FN SEM , la société d’économie mixte est un dispositif trop lourd pour gérer des projets locaux de petite ou moyenne envergure (l’envergure dont il s’agit ici a trait aux besoins financiers et logistiques, il ne s’agit pas d’apprécier le degré d’intérêt ni l’impact souhaité de telle action sur tel territoire). Donc, nombre d’actions ne voient pas le jour faute d’outil adéquat qui permette la conjonction du public et du privé sans les contraintes, eu égard au dit projet, de la SEM par exemple. La Scic, par l’ouverture légale qui lui est faite si elle le souhaite, d’inclure dans son sociétariat des collectivités publiques sans décret en Conseil d’Etat , donne un cadre plus souple à un projet de développement qui va pouvoir mieux s’exprimer, via un statut juridique qui incite à collaborer en toute transparence. L’opération citée participera, avec les Scic existantes, à prouver que cette nouvelle forme de coopérative ne vient pas résoudre miraculeusement des difficultés qui n’ont pas été surmontées auparavant, mais qu’elle fournit des moyens opérationnels mieux ajustés à certaines situations. D’ailleurs, ce constat est exactement le même pour des associations qui souhaitent se transformer en Scic comme la loi les y autorise : la Scic leur donne de nouveaux moyens de partenariats, et donc de création d’activité ou de développement si tel est leur projet, elle ne vient pas par essence résoudre des difficultés économiques, fiscales, ou d’organisation que l’association n’aurait pas su traiter jusqu’alors.

Un nouveau type de rapports entre acteurs privés et publics : collaboration, synergie, coopération,… toutes choses qui ne sont pas instinctives et qui demandent souvent un apprentissage. Sur ce sujet, Y. Lasica, consultant qui travaille entre autre pour le CPPM et qui participe à l’Inter-réseaux Scic, raconte :
"Sous l’impulsion d’associations, d’artisans, d’entreprises, de bénévoles, de divers acteurs de la valorisation du patrimoine bâti, un groupe projet informel s’est constitué récemment sur un territoire de la dimension d’un canton. Par son dynamisme, ce groupe est parvenu à mobiliser l’ensemble des partenaires intervenant sur le patrimoine bâti rural à l’échelle du département, sauf les collectivités territoriales qui sont restées dans un premier temps dans une position d’observation. Après deux réunions du groupe projet avec les acteurs départementaux (services de l’Etat, syndicats du bâtiment, CAUE,...), le Conseil général et la Communauté de communes concernés se sont rapprochés pour suivre le projet de plus près, en vue de s’y impliquer. Ainsi, simplement par leur travail collectif, par leur volonté de fédérer et d’innover, les initiateurs du projet sont devenus un groupe porteur d’un intérêt visible et crédible sur le territoire. Du coup, les collectivités territoriales s’intéressent maintenant au projet de Scic. Elles y voient un cadre pertinent pour structurer l’initiative d’un groupe d’acteurs privés autour d’une thématique complexe d’intérêt collectif, sans que pour autant tout repose exclusivement sur elles."

La permanence de l’intérêt collectif suppose la transparence. La Scic est soumise aux mêmes obligations de taxes, d’impôts, de publication et de contrôle que toute Sa ou Sarl. De plus, l’agrément nécessaire du préfet de département, préalable à l’inscription au RCS , ainsi que la révision coopérative obligatoire tous les 5 ans, sont deux procédures qui encadrent les objectifs et la gestion d’une Scic, et la contraignent à évaluer et conserver sa finalité altruiste . Sans invoquer une intégrité inviolable et sans taches, voilà, malgré tout, quelques garanties pour le crédit qu’on peut lui porter ! Les éventuels détracteurs, peuvent, s’ils le souhaitent, adopter les mêmes règles de fonctionnement.

La scic est un outil de développement local et durable. Elle vise à créer, consolider, développer et pérenniser de l’activité sur un territoire dans le respect et l’intérêt de toutes les composantes de ce territoire. En bonne société commerciale qu’elle est, elle va générer des excédents ; et en bonne coopérative d’intérêt collectif qu’elle est, elle va les réinvestir dans sa recherche et son développement. En effet, à une nuance près réglée dans chaque statut, la Scic est une société commerciale à but non lucratif. Son objectif premier est l’enrichissement collectif du territoire et de ses composantes, pas l’enrichissement individuel de ses sociétaires, ce que d’ailleurs la loi interdit formellement. Ceux qui la créent, forcément les acteurs d’un territoire parmi lesquels la présence de collectivités publiques est optionnelle, chercheront dans le territoire lui-même les moyens du meilleur développement. L’ensemble des investissements viendra renforcer l’économie locale de façon durable. A l’instar de la Scop, dont elle est différente mais proche, la Scic n’est pas une société "opéable" : "délocalisation" ne fait pas partie de son vocabulaire.

Entre intérêt public et intérêts privés, l’intérêt collectif de la Scic réside essentiellement dans l’originalité de son organisation en multisociétariat.

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