Revenu de solidarité active - Le cynisme du Gouvernement et du patronat ?

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Revenu de solidarité active - Le cynisme du Gouvernement et du patronat ?

Un précipice se creuse entre les objectifs initiaux du RSA et ceux qui se dessinent après le vote de la loi en décembre dernier et l’examen des premiers décrets d’application. A compter du 1er juin 2009, le RSA remplacera le RMI, l’API.

A l’origine, le RSA, combinant revenu du travail et de la solidarité, était destiné à palier les effets de seuils qui conduisaient à une perte de revenu pour les bénéficiaires du RMI ou de l’API reprenant un emploi. Déjà en 2005 la commission « famille pauvreté vulnérabilité », dont les travaux ont conclu à la proposition de créer le RSA, précisait que cette disposition ne devait pas conduire à déstructurer l’emploi et encourageait à pénaliser les entreprises utilisatrices de temps partiel à très petite durée. Elle insistait pour une politique plus favorable à l’emploi et à la qualité des emplois. Pour sa part, la CGT saluait les travaux de la commission tout en faisant part de son extrême vigilance pour que ce nouveau dispositif ne puisse servir de prétexte aux employeurs à élargir le nombre d’emplois à temps partiel et précarisés. La recherche de solutions contre la pauvreté et l’exclusion sociale et professionnelle ont motivé l’investissement de la CGT dans les travaux engagés par le Haut Commissariat aux Solidarités Actives.

Force est de constater que les effets pervers du RSA prennent le pas sur ces objectifs initiaux. Il devient au fil des mois un outil supplémentaire au service de la politique coercitive gouvernementale de l’emploi, un levier pour le patronat dans la réduction du coût du travail en précarisant l’emploi. Simultanément, il dégage ses responsabilités sur la collectivité appelée à compléter les revenus du travail et à assumer les conséquences sociales de ces stratégies économiques et financières.

L’article 1 de la loi stipule en effet que « le revenu de solidarité active complète les revenus du travail ou les supplée pour les foyers dont les membres ne tirent que des ressources limitées de leur travail et des droits qu’ils ont acquis en travaillant ou sont privés d’emploi,… ». Un des décrets d’application prévoit d’inclure l’indemnisation du chômage partiel pour le calcul du RSA. D’un côté le patronat concède [1] de porter l’indemnisation du chômage partiel à 60% sous réserve d’une augmentation de plus de 50% de la contribution de l’Etat ; il exclut de toute indemnisation les salariés à temps partiel ; il revendique de relever le plafond du nombre d’heures autorisées et la durée du chômage partiel. De l’autre, avec la complicité du Gouvernement, il crée les conditions pour que la solidarité nationale finance, via le RSA, une partie du revenu de remplacement des salariés victimes du chômage partiel. Dans cette configuration Il est tout à fait possible d’imaginer que demain le RSA se substituera à l’insuffisance de l’indemnisation du chômage et participera de fait à une précarisation accrue de l’emploi.

Ces tours de passe – passe donnent un relief tout particulier au contenu de la convention de l’assurance chômage que 4 organisations syndicales refusent de signer parmi lesquelles 3 font valoir leur droit d’opposition. La réduction envisagée des durées d’indemnisation conduirait à restreindre considérablement le nombre de salariés indemnisés. Exclus du régime, ils viendraient grossir les rangs des bénéficiaires du RSA. De plus, le patronat veut amoindrir les droits des chômeurs reprenant une activité réduite ou occasionnelle : réduction de la durée pendant laquelle est ouvert le droit de cumuler indemnisation chômage et revenu du travail. [2]

Les ambitions portées par la CGT dans le cadre des négociations chômage, total ou partiel, restent d’actualité tout comme celles développées lors des consultations sur la création et la mise en œuvre du RSA et durant les travaux du Grenelle de l’Insertion. Elle ne peut accepter le dévoiement de politiques publiques destinées à prévenir et à éradiquer les situations de pauvreté et d’exclusion au profit de ceux qui en portent l’entière responsabilité : les employeurs ; les actionnaires.

La CGT réaffirme sa volonté d’apporter des réponses satisfaisantes et pérennes pour prévenir et éradiquer la précarité, la pauvreté et l’exclusion et ce en s’attaquant aux racines qui les génèrent. Cela implique l’augmentation du taux d’emploi, des salaires et du pouvoir d’achat. Cela passe par l’amélioration des niveaux de qualification de toute la force de travail - des salariés en emploi et ceux privés d’emploi - par un effort permanent de formation initiale et continue avec des moyens appropriés et par une reconnaissance des qualifications dans les salaires. Cela suppose une répartition nouvelle des richesses créées par le travail, des droits d’intervention étendus des salariés sur les stratégies et les gestions des entreprises.

La création du RSA pouvait contribuer à l’éradication de la pauvreté et de l’exclusion à condition de s’inscrire dans une dynamique de véritable revalorisation du travail ; c’est l’inverse qui est mis en œuvre.

La CGT appelle les salariés, avec ou sans emploi, à exprimer le 29 janvier prochain leur volonté de politiques publiques efficaces pour lutter contre ce fléau de la pauvreté et d’ouverture de nouvelles négociations sur les conditions d’indemnisation des périodes de chômage.

La reconnaissance du droit au travail pour tous et l’accès à un emploi de qualité ne peut souffrir du cynisme du Gouvernement et du Patronat.

[1Voir déclaration de la CGT à l’issue de la négociation sur le chômage partiel

[2Voir déclaration de la CGT à l’issue des négociations sur la convention assurance chômage

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