Décriées par l’opposition et les syndicats, les ordonnances réformant le marché du travail en France font la joie de la Commission européenne et du patronat.
C’était une promesse de campagne d’Emmanuel Macron : la réforme de la loi travail serait sa priorité. Jeudi 31 août, le Premier ministre Édouard Philippe et la ministre du Travail, Muriel Penicaud, ont présenté une série d’ordonnances, destinées à modifier la loi travail existant.
Officiellement destinées à « renforcer le dialogue social », ces mesures qui vont du plafonnement des indemnités en cas de contentieux à la réduction des délais de
recours des salariés, en passant par la possibilité de négocier sans syndicat en dessous de 50 salariés, vont clairement dans le sens du patronat. Elles ont d’ailleurs été chaleureusement accueillies par Pierre Gattaz, qui les qualifie de « première étape importante » pour « conforter la confiance des chefs d’entreprise ».
« Fin du travail », « escroquerie »
Les mesures ont en revanche été fraîchement accueillies par les socialistes et l’extrême gauche, et dans une moindre mesure par les syndicats.
« C’est la fin du contrat de travail », s’est désolée le responsable CGT Philippe Martinez, alors que la CFDT se dit déçue, mais n’appelle pas à manifester lundi 12 aux côtés des protestataires. La gauche radicale a en effet invité à deux défilés, les 12 et 23 septembre prochain. L’extrême droite a dénoncé le texte comme une escroquerie.
Les mesures en question sont en revanche perçues comme un gage de confiance par les partenaires européens. Le vice-chancelier allemand, Sigmar Gabriel, a déjà salué cette initiative le 30 août. Et la Commission européenne ne tarit pas d’éloge sur la réforme, en des termes encore plus élogieux que lors de la présentation de la loi El Khomri en 2016.
Il faut dire que les ordonnances proposées répondent assez directement aux réclamations régulières de l’exécutif européen, qui évoque à l’envi les rigidités du marché du travail, ou le niveau trop élevé du salaire minimum et des charges sociales patronales en France. Notamment dans le cadre du semestre européen : la France est encore dans le cadre du volet correctif du pacte de stabilité budgétaire, une procédure qui suppose une surveillance accrue de la part de ses partenaires.
Dans ce cadre, en plus de la réduction des dépenses, les experts de l’UE ne cessent de réclamer un assouplissement des règles françaises, comme dans ce texte du dernier semestre européen.
L’enjeu du nombre de salariés dans une entreprise et des effets de seuils (des règles de négociations spécifiques s’appliquant à partir de dix, puis 50 salariés), que les ordonnances souhaitent relativiser, était clairement souligné dans le dernier texte de recommandation de la Commission européenne.
Un contact continuel entre Juncker et Macron
Le président de la Commission Jean-Claude Juncker a été continuellement en contact avec le président français sur le sujet. « C’est un pas dans la bonne direction. Nous accueillons favorablement et appuyons la réforme du marché du travail du président Macron » assure une porte-parole de la Commission européenne à Euractiv, insistant sur le fait que cette réforme porte « le signe de l’engagement de la responsabilité européenne » du président français.
Un engagement européen que le patronat appelait également de ses voeux dans la bouche de Pierre Gattaz, le 30 août, à l’université d’été du Medef.